On a décidé de vous faire un petit article sur nos quotidiens dans le monde d'Embellie V. Alors évidemment, la vie en mer ne ressemble ni de loin ni de près à la vie sur terre, et il ne sera ici question que de la vie à bord.

Pour commencer, parlons de l'équipage : il est étonnamment disparate. Personne ne se ressemble. Déjà il s'agit d'un arc-en-ciel générationnel:

• Luc, 22 ans, est un Nantais plutôt sédentaire et ingénu, ingénieur en master à l'ICAM (Institut Catholique des Arts et Métiers). Il a une foi a toute épreuve et se révèle être de loin le plus pur d'entre nous.
• Nathalie, est en quelque sorte notre cordon bleu étoilée à nous... elle a de l'or dans les doigts ! avec quelques grains de cumin trois grains de riz elle parvient toujours à nous remettre d’aplombs. Ça vaut son pesant d'or. Elle est aussi notre référente histoire de l'art, et croyez moi il fait bon l'écouter pour se coucher moins sot. (Je dois rajouter à ce stade, qu'à chaque escale quelqu'un veut nous la défausser. Mais Nathalie ne perd pas le sens la raison).
• Jules, est un nomade pur souche, un grain cultivé. Il a séjourné à la Villa Médicis et en Australie. Il tente régulièrement de se confronter au pilote automatique, d'un niveau jusque là inégalé.
• Enfin, Alain, 78 ans, Skipper quelque peu radoteur... mais exceptionnellement vadrouilleur et curieux. Le genre de grand père entreprenant et qui ne rechigne jamais à aller où les autres n'iront pas. Çà ne se fait plus ce genres d'Alain-là.

Ce qui est vraiment appréciable sur Embellie 2018, c'est que tout le monde a son avis bien à lui. On ne vient pas des mêmes endroits, n'avons pas reçu les mêmes éducations. Et nous n'hésitons pas à débattre, confronter nos idées... faire de la politique en somme.

On parle des familles respectives, et des prénoms reviennent souvent. Marie, Zoé et Caribou (Nathalie aime bien sa famille). Abel, Ghislain, Gilda. A mesure que l'on s'éloigne des rives européennes, on n'éprouve un désintérêt croissant pour l'actualité que l'on a laissé derrière nous. A mesure que les semaines et les mois passent, notre quotidien s'établit sur Embellie, et on s'y identifie. On forme un tout, et nous autres nous entendons bien.

A table, les échanges sont très variés. Nous parlons poésie symboliste, de Macronie, de Printemps Arabe. Nous refaisons l'Histoire de France, Napoléon toute et l'anglais l'ennemi. Nous débattons sur les technologies offshore, la réincarnation de dieu sur d'autres planètes ou encore les calamars géants.

Embellie V, est aussi le théâtre d'un rituel bien rodé de jeu de carte qui a l'art de soulever les passions de tout un chacun: et pour cause, le gagnant fait la vaisselle. L'épreuve fatidique, quoi. Bref, il y a de quoi avoir des palpitations à bord.

A la question, vous ennuyez vous durant la navigation ?

Je ne vois pas comment ! Nous sommes sur un voilier dynamique qui offre des ressources pour améliorer la navigation. Entre les manœuvres au moteur, les tentatives au Spi avant d'affaler toute et mettre à temps 2 ris à la GV car le vent a dépassé les 20 nœud... c'est parfois du sport. Nous sommes en permanence assis sur la fesse droite, dans la main de Dieu, et sur la fesse gauche, dans celle du Diable. Autrement dit, une situation qui semble idyllique peut vite tourner. A ce moment là, la mer reprend ses droits, sauvage.

A part ça, les tâches sont richement diverses: entre les travaux de cartographie, les études météorologiques via irridium, les travaux mécaniques. Entre les ateliers coutures (confection de A à Z du drapeau Mauritanien introuvable sur le marché), les opérations chimiques de dessalinisation de l'eau de mer et les réparations électroniques. Nous ne pouvons pas nous ennuyer, puisque à chaque problème résolu, un autre apparaît. C'est en naviguant que l'on entretient son bateau.

Jusque-là, au demeurant, on ne parle pas de notre tâche la plus élémentaire qui consiste à nous nourrir - la pêche. Car c'est bien une armada de ligne que nous montons, en essayant différents stratagèmes afin de piéger le tant attendu poisson qui ne mord pas toujours.

N'allez cependant pas croire que la vie sur Embellie n'est qu'une vie de dure labeur. Nous avons tout le loisir de lire. Nous avons des bouquins à foison, et par temps calme le carré intérieur peut presque s'apparenter à une bibliothèque municipale. Pour le reste, grâce à de puissants disques externes, nous disposons d'une bonne centaine de film.

A chaque fois que l'on accoste, c'est le moment de reprendre contact avec son hygiène. Une bonne douche ne manque qu'à celui qui n'en a pas pris pendant plus de 4 jours. C'est aussi le moment d'aller prendre l'air, souffler un bon coup et prendre la température locale.

Dans tous les cas, c'est toujours un plaisir de ré-appareiller pour de nouvelles aventures.